À lire, un article de Pierre Le Coz et de Gilles Bouvenot intitulé «L’innovation thérapeutique ne saurait tenir lieu de progrès médical. Plaidoyer contre l’abus de la dénomination de médicament innovant», paru dans le Bulletin de l’Académie Nationale de Médecine le 23 juillet 2024, dont voici le résumé:
Notre société désenchantée semble avoir fait son deuil de la notion de progrès qui avait soulevé l’enthousiasme de générations de chercheurs et de médecins au cours du siècle dernier. Contesté au nom des méfaits de la société industrielle, le progrès est un mot qui se démode et cède sa place à la notion plus extensive d’« innovation ». Mot-clé du vocabulaire de la communication et du marketing, l’innovation s’est répandue au-delà de l’univers de la consommation et de la publicité, jusque dans l’espace public et le discours politique. Innover est devenu le nouvel impératif catégorique de notre temps. Le domaine du bien-être et de la santé n’y échappe pas. Le fait est que le mot innovation est de plus en plus utilisé dans les congrès médicaux. Cette puissance séductrice peut conduire à abuser les médecins et surtout les patients qui réclameront un « droit d’essayer », quitte à sous-estimer la question sécuritaire du respect des exigences méthodologiques. Face à cette pente glissante, le présent article entend rappeler que ce qui est important pour les malades n’est pas la nouveauté mais l’efficacité et la sécurité d’emploi des produits qui leur sont administrés. Si nous voulons maintenir une cloison étanche entre « produit de santé » et « produit marchand », entre le « patient » et le « client », il faut rappeler la portée scientifique incontournable et la valeur éthique inestimable de la notion de progrès médical.