Guérir au-delà du corps
À la croisée des soins et des besoins spirituels
À l’approche des fêtes de fin d’année, la réouverture tant attendue de la cathédrale Notre-Dame de Paris offre un puissant symbole d’espoir et de résilience. Ravagée par les flammes, elle se relève cinq ans plus tard pour nous délivrer le message universel qu’au-delà des blessures visibles, force et volonté conjuguées transcendent les épreuves et permettent de se reconstruire.
Ce message résonne également dans l’univers du soin, car nous savons qu’au-delà des indispensables traitements médicaux le processus de guérison nécessite de mobiliser des ressources internes qui échappent aujourd’hui à la science. Nous les nommons pudiquement «énergie vitale» et présupposons qu’elles rendent compte de la force de l’esprit sur le corps.
Dans nos établissements de santé, la question de la prise en compte des besoins spirituels des patients reste encore trop souvent marginale. Pourtant, littérature médicale et témoignages de malades le confirment: la foi et l’espérance d’un jour meilleur contribuent significativement au processus de résilience et à l’accomplissement de la guérison. Car la maladie ne se réduit pas à sa seule dimension biologique: elle touche l’être dans son ensemble, ébranle ses repères, questionne le sens même de sa vie. Dans ces moments de fragilité, l’invocation du spirituel – quelle que soit sa forme, religieuse ou plus largement philosophique, culturelle, existentielle – peut devenir le levier de forces intérieures insoupçonnées qui aident le patient à retrouver un sentiment d’unité, de cohérence personnelle, voire une direction de vie.
La ferveur populaire mobilisée par la réouverture de Notre-Dame nous rappelle la puissance de ces espaces symboliques qui transcendent les clivages culturels et religieux et où chacun peut y puiser un regain de vitalité face aux épreuves de la vie. Que ce soit un lieu de culte dédié, une simple salle de méditation, un jardin de contemplation ou la présence rassurante à leur chevet d’aumôniers capables d’écouter sans juger, ils sont le complément essentiel des approches médicales traditionnelles.
Au-delà des infrastructures, c’est aussi une question de posture des soignants. Prendre en compte la dimension spirituelle du malade, c’est reconnaître qu’un individu n’est jamais réduit à un corps souffrant ou à un diagnostic. C’est ouvrir un dialogue empathique, écouter les doutes et les espoirs, et accompagner l’Autre dans sa quête d’un futur mieux-être.
Les fêtes de fin d’année réveillent souvent en nous un besoin de spiritualité. C’est l’occasion, pour les professionnels de santé comme pour les proches, de redécouvrir l’importance de cette dimension souvent invisible mais essentielle. Une main tendue, une parole d’encouragement ou une simple présence attentive peuvent devenir pour le malade une ressource inestimable lui ouvrant un horizon qui ne se limite plus alors au symptôme, à la douleur, ou à l’annonce traumatisante de son diagnostic.
En ce mois de décembre, à l’heure où Notre-Dame de Paris réouvre ses portes, puissions-nous nous inspirer de cette renaissance pour reconnaître dans le parcours de guérison la place d’une dimension spirituelle qui sera une puissante alliée dans le combat singulier que chaque malade mène pour se reconstruire. Prenons la mesure de cette force et engageons-nous à en faire une partie intégrante de nos pratiques de soin.
En vous souhaitant une très belle fin d’année, je formule le souhait que ces fêtes à venir ne soient que chaleureux moments de partage avec tous ceux qui vous sont chers.
Pr Gilles Bernardin