À lire, un article de Séverine Mathieu intitulé Des normes procréatives sécularisées? L’opposition catholique française à l’ouverture de la PMA aux couples de femmes et aux femmes seules paru dans la revue Enfances, Familles, Générations (n°38, 2021), dont voici le résumé:
« Cadre de la recherche : Dans le contexte de la nouvelle révision des lois de bioéthique française, entre 2018 et 2020, l’Église catholique est très active, en particulier à propos de l’ouverture de la Procréation médicalement assistée (PMA) aux couples de femmes et aux femmes seules.
Objectifs : Cet article se propose d’explorer comment les normes procréatives catholiques, qui voudraient fixer les conditions d’entrée dans la parentalité, sont retraduites dans un argumentaire séculier.
Méthodologie : L’enquête sociologique de type ethnographique repose sur deux formes de matériaux. D’une part des observations réalisées lors des États généraux de la bioéthique qui se sont tenus entre janvier et mai 2018 et d’autre part, une analyse des propositions faites sur le site des États généraux de la bioéthique, ouvert entre janvier et juin 2018. Des interventions faites dans les médias et des documents produits par l’institution catholique sont également utilisés dans cette recherche.
Résultats : Le magistère romain cherche à montrer que ses prescriptions en matière familiale ne se fondent pas sur la foi, mais sur une juste compréhension des mécanismes de la nature. Pour ce faire, les discours de l’institution empruntent à une rhétorique qui fait référence à une bibliothèque séculière.
Conclusions : Dans ce contexte, la mobilisation catholique contre l’ouverture de la PMA aux couples de femmes et aux femmes seules s’attelle à ne pas faire changer le droit, en appelant à des valeurs dites « traditionnelles », les défendant au nom de principes séculiers, expression d’un catholicisme « ostensible » (Hervieu-Léger, 2017), dont les normes n’imprègnent plus le droit procréatif.
Contribution : On voit ici comment, pour faire valoir les normes procréatives qu’elle défend, dans la lignée de sa réprobation de la contraception et de l’avortement, l’institution catholique a recours à des normes séculières qui témoignent également de la sécularisation du catholicisme. »